Samedi de l’AECSE du 20 mars 2021. La question de la place de la recherche en sciences de l’éducation et de la formation dans les masters MEEF, dans le contexte de la réforme de la formation initiale des INSPÉ.

La commission Formation dans et hors l’école a souhaité se saisir, lors du samedi de l’AECSE du 20 mars, de la question de la place de la recherche en sciences de l’éducation et de la formation dans les masters MEEF, dans le contexte de la réforme de la formation initiale des INSPÉ.

 

Six ans à peine après avoir vu la transformation des IUFM [1] (créés en 1991) en ÉSPÉ [2] (en 2013), la formation des enseignants subit une nouvelle refonte. En effet, l’arrêté du 28 mai 2019 fixe un nouveau cadre national des formations dispensées au sein des masters MEEF [3] dans le cadre de la création des INSPÉ, les écoles supérieures devenant instituts nationaux. Cette dernière réforme portée essentiellement par le ministère de l’Éducation nationale (la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation étant restée discrète sur le sujet), a pour objet officiel l’harmonisation des formations proposées. Au-delà de cette harmonisation, elle contient de nombreux éléments qui questionnent, comme la modification de la place du concours de fin de M1 à fin de M2 ; le passage du niveau licence à celui de master pour être titularisé ayant été acté en 2013. La modification du statut des étudiants en M2 qui étaient fonctionnaires-stagiaires depuis la création des IUFM, deviennent « étudiants contractuels » à la rentrée 2021. En effet, ce changement va contraindre les étudiants à préparer leur concours, tout en travaillant à la réussite de leur master et, pour nombre d’entre eux, à assurer à temps partiel la charge d’une classe en tant que contractuel.

 

Dans ce contexte qu’on peut imaginer anxiogène, nous faisons l’hypothèse que les tutelles ont choisi l’allègement de la place de la recherche dans la formation pour amoindrir la charge de travail des étudiants. Ainsi, la place du mémoire et sa valeur deviennent presque anecdotique dans la formation. Comment la compétence 14 du référentiel de compétences professionnelles des professeurs (S’engager dans une démarche individuelle et collective de développement professionnel) peut-elle être mise en œuvre pendant la formation, dans ces conditions ? Fragiliser la recherche conduit inévitablement à modifier la professionnalisation des enseignants et donc leur professionnalité. Comment amener les étudiants à transformer des questions professionnelles, par ailleurs légitimes, pour aller vers une problématisation des situations, adopter une posture de chercheur permettant de privilégier l’analyse des situations éducatives à l’édiction de préceptes de conduite et finalement une posture de praticien réflexif ? C’est une représentation de la professionnalité enseignante et plus largement des différents professionnels de l’École et des métiers de l’éducation et de la formation qui est en jeu. Par ailleurs, ce mouvement s’accompagne d’une délégitimation du travail des enseignants-chercheurs avec l’attribution d’environ 30 % des enseignements à d’autres types d’intervenants, présentés comme des « professionnels de terrain ».

 

Dans ce contexte, les enseignants-chercheurs et formateurs s’inquiètent de la place laissée aux sciences de l’éducation et de la formation et, plus spécifiquement, aux champs de recherche qui sont communément les leurs dans les nouvelles maquettes. Dans certaines mentions, en fonction des universités de rattachement ou des différents laboratoires auxquels sont adossés les masters, les problématiques de la discipline sont plus ou moins présentes. Pour exemple, le cadrage des maquettes mention « Premier degré », avec une centration sur les disciplines scolaires mathématiques et français, laisse peu de place aux contenus de formation proposés par la discipline universitaire sciences de l’éducation et de la formation, historiquement engagée dans la professionnalisation des enseignants. Dans le contexte de cette nouvelle réforme de la formation des enseignants, quelle est la place et quelles sont les fonctions de la recherche en sciences de l’éducation et de la formation dans les parcours de master MEEF des métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation ?

 

Le 20 mars 2021, l’AECSE souhaite partager ses interrogations avec toute la communauté impliquée dans la formation des professionnels de l’École et des métiers de l’éducation et de la formation et propose un échange à partir des présentations faites par Alexandre Ployé et Patricia Tavignot. Alexandre Ployé, maître de conférences à l’INSPÉ de Créteil (CIRCEFT, Université Paris-Est Créteil), proposera une réflexion sur la formation par la recherche dans le cadre d’une approche clinique à partir de deux axes : l’accompagnement clinique du formateur et l’initiation à la professionnalisation des enseignants dans le cadre de l’École inclusive. Patricia Tavignot, maîtresse de conférences à l’INSPÉ de Rouen (CIRNEF, Normandie Université) proposera d’identifier des points de vigilance pour la formation des enseignants du 21ème siècle, à partir de résultats d’une recherche longitudinale portant sur trois promotions d’enseignants.

 

[1] Institut Universitaire de Formation des Maîtres

[2] École Supérieure du Professorat et de l’Éducation

[3] Métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation